La Bonne Fontaine - Guten Brunnen

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LIEUX

Camille - La plume des lacs

11/13/20244 min read

Connaissiez-vous la singulière histoire de la Bonne Fontaine (Guten Brunnen) ?

Elle se situe sur le chemin de Hoste vers Farschviller, en direction de Cappel. Elle est aujourd’hui bien signalée, le parcours est balisé et à l’abri de la boue, qui entourait autrefois les lieux, tout comme cette petite forêt, qui apporte du mystère à cette chapelle et sa source d’eau.
Aujourd’hui un lieu de calme et de recueillement, il fut jadis un lieu plein d’effervescence, rassemblant des milliers de visiteurs, des cinquantaines d’échoppes et des centaines de fantassins, hussards ou encore dragons.

Tout commence en avril 1799, quand une rumeur fit courir le bruit que la Vierge était apparue dans des fioles contenant l’eau de la Bonne Fontaine. Cette eau était soi-disant miraculeuse, elle avait le pouvoir de guérir instantanément tous les maux. Pour exemple, on citait une jeune femme, guérie de la possession du diable après l’avoir bue, ou encore une femme aveugle qui recouvra la vue grâce à l’eau miraculeuse.

Le bruit s’était répandu partout aux alentours, et ces guérisons attirèrent près de 6000 voire 10 000 personnes qui venaient se baigner nuit et jour dans la fontaine. Les gens venaient de tous les coins de Moselle, ce qui créa des attroupements plutôt impressionnants, à l’échelle d’un village tel que Hoste. Cette situation alerta rapidement le Président du tribunal de Faulquemont, qui évoqua la création d’un foyer de fanatisme et qui décida de poursuivre les instigateurs de ce mouvement.

Début mai, cinq gendarmes dispersèrent les foules, et les administrateurs des cantons environnants invitèrent leurs habitants à ne pas se rendre à Hoste, sous peine d’être arrêtés.

Fin mai, un papier relatant les guérisons miraculeuses est imprimé et distribué, ce qui attira à nouveau bon nombre de pèlerins, qui arrivèrent de plus en plus loin, de 30 à 40 lieues (150 à 200 kilomètres).
Les administrateurs des cantons craignirent que ces pèlerinages, ce fanatisme et cette superstition ne déclenchent une guerre de religion. Dans un contexte post-Révolution, où les révoltes religieuses contre la République allaient bon train, ils décidèrent de faire appel aux forces armées.

Début juin, des pèlerins de Langres assistèrent à une guérison, celle de Gertrude Derving, sourde-muette depuis quatorze ans, qui retrouva l’audition et la parole grâce à l’eau de la Bonne Fontaine.
Le site, qui ressemblait alors à une grande foire, comptait plus de 50 boutiques, des guinguettes se tenaient dans la plaine et dans les bois environnants. Il n’y avait désormais plus assez de pain ni de vivres pour nourrir tous les pèlerins. Pour tenter de réguler la situation, 33 hussards y furent envoyés. Ils distribuaient eux-mêmes l’eau, moyennant paiement.

Des estropiés, des infirmes et autres boiteux affluaient toujours, quand le Commissaire du directoire les vit de ses propres yeux ressortir de l’eau en marchant normalement. Le flux de voyageurs était loin d’être contrôlé. La décision fut prise d’envoyer 2 officiers, 250 fantassins, 50 chevaux et 2 canons à Hoste pour tenter de maîtriser la situation. Malgré cela, un jeu de chat et de la souris s’était installé entre les autorités, chargées de disperser la foule, et les pèlerins. Des femmes, enfants et autres éclopés arrivaient de plus en plus loin, sans signe extérieur de culte, pour ne pas se faire arrêter. Ils campaient à la lisière des forêts voisines, pour s’y cacher quand les forces armées arrivaient.

Le 18 juin signe la fin des attroupements, la Bonne Fontaine fut comblée. Cependant, des étrangers s’étaient mis à vendre de l’eau du ruisseau dans des figurines à l’effigie de la Sainte Vierge.

Le 26 juin, des voyageurs du Bas-Rhin, de Meurthe et du Luxembourg ont afflué en masse, puis ont été dispersés par les 60 dragons présents. Cela signa la fin des attroupements de la Bonne Fontaine. Les villages de Hoste et de Cappel ont été sommés par la suite de combler la fontaine et son ruisseau.

Au début du XIXe siècle, on retrouvait encore des cache-œil, ou des béquilles, abandonnées par les estropiés désormais guéris. Les pèlerins continuaient de se déplacer à la Bonne Fontaine encore durant une cinquantaine d’années, mais bien moins nombreux.

C’est en 1848 qu’une croix fut élevée à côté de la source, et le calvaire entouré de quatre murs recouverts d’un toit. En 1902, la chapelle fut repeinte et la source mise en valeur.

Peut-être penserez-vous à cette anecdote lors de votre prochaine promenade sur nos sentiers. Essayez d’imaginer l’effervescence de ces lieux chargés d’Histoire. 😊

Je vous souhaite à tous et à toutes une bonne soirée.